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Mes sorties cyclistes au féminin

El Pico Veleta - 3398m - Espagne

La route qui monte au somme d'El Pico Veleta est la plus haute route d'Europe et culmine à 3 398 mètres d'altitude. Cette route n'est pas asphaltée jusqu'à son sommet et c'est sans doute l'une des raisons pour laquelle (avec la chauvinisme), on continue à lire partout que la route de la Cime de la Bonette est la plus haute route d'Europe. Ce n'est pas un col puisqu'elle ne relie pas deux vallées entre elles mais une ascension au sommet. Elle grimpe une montagne où personne ne vit et, hormis pour accéder à la station de ski et l’observatoire qui culmine à 2800 mètres d’altitude, son utilité est donc toute relative...

El Pico Veleta est situé au coeur de l'Andalousie, dans la Sierra Nevada. C'est le troisième sommer le plus haut d'Espagne et il surplombe la ville de Grenade.

Le descriptif ci-dessous n'est pas de moi mais un mix des récits de Guillaume Prébois et d'Olivier Rochat, deux cyclistes qui ont réalisés l'ascension respectivement en 2013 et 2018. 

Un sommet inconnu et oublié

Lors de son "aventure" avec le cycliste Guillaume Prébois, un ami espagnol cycliste confirmé lui avoue qu'il n'a grimpé Le Veleta qu'une seule fois en dix ans alors qu'il vit pourtant au pied de cette montagne géante. Les gens de la région montent en effet aussi rarement au sommet de la plus haute route d'Europe que les Parisiens au troisième étage de la tour Eiffel. L'Alhambra de Grenade, inscrit au Patrimoine mondial de l'Unesco attire comme un aimant 2 millions de touristes par an et l'hiver, c'est la station de ski de Prado Llano qui fournit du travail à des centaines de familles. Quant à la route la plus haute d'Europe, c'est la grande oubliée des brochures de l'office du tourisme et des panneaux routiers, qui n'en indiquent même pas la direction. Le Pico Veleta est victime d'une amnésie collective. On en trouve tout de même quelques mentions ça et là : sur les étiquettes de l'eau minérale Lanjaròn qui met en bouteille l'eau des neiges du Veleta et un des restaurants gastronomiques les plus cotés de la région, à Cenes de la Vega, porte son nom : Ruta del Veleta. 

C'est en 1920 que William Davenhil, un montagnard passionné, rencontre au sommet du Pico Veleta l'ingénieur Juan Jose Santa Cruz. Ils décident de construire une route afin d'offrir à tous le spectacle grandiose du Veleta. Quinze ans plus tard, la première voiture atteignait la cime du Veleta. Les écologistes ont rapidement dénoncé le massacre environnemental et en 1999, la sierra Nevada a été classée parc national. Depuis, l'accès aux véhicules est limité par une barrière surveillée par un gardien, à une dizaine de kilomètres du sommet mais rien n'est fait à l'échelle locale pour promouvoir ce lieu aux sportifs du monde entier.

Pourtant, une course annuelle propose à des fanatiques de le gravir en courant. Départ de Grenade, 50 km de montée, un grand marathon vertical pour masochistes. Depuis 1993, une épreuve cycliste pour amateurs propose le même parcours, une interminable course de côte pour grimpeurs patentés. Antonio Velez l'a gagnée dix fois d'affilée, une performance unique dont on parle dans tous les clubs de vélo d'Espagne.

L'ascension

L’ascension débute à Grenade même. Trois routes permettent d’aborder la première partie. Celle de Monachil via le col du Purche est réputée la plus dure comme la plus belle. L'ascension fait environ 47kms (de 700m à 3400m d'altitude) . La pente ne faiblit quasiment jamais, sans pour autant créer de passages vraiment raide (sauf par Monachil). Avec un total de 2700 mètres de dénivelé positif et presque sans le moindre plat, la difficulté principale reste la longueur, l’altitude et les conditions climatiques.

La forêt d'acacias de Pinos Genil précède la première rampe sérieuse. La route s'entortille et décolle au-dessus des plaines fertiles de la Vega où l'on cultivait autrefois les vers à soie. Sur la chaussée, on peut crosier lézards en fuite et vipères écrasées. Après quelques kilomètres entre les oliviers, le chemin bucolique rejoint l'A395, une double voie avec glissière de sécurité, sans charme, asphaltée comme un circuit de Formule 1. Toutes les plus grandes marques de voiture se livrent ici à des essais top secret, une véritable guerre technologique. Audi, Mercedes, Aston Martin, Porsche et bien d'autres viennent mettre leurs nouveaux moteurs à rude épreuve : chaleur et altitude agressent la mécanique. Dégagement de monoxyde de carbone, pression, température : tout est enregistré, envoyé au siège et décrypté. Les prototypes des modèles qui sortiront sur le marché dans deux ou trois ans montent et descendent inlassablement les routes torrides de la sierra Nevada.

La pente frôle maintenant les 7%. Pas de lacets, des virages sans prétention, amples et pittoresques. Elévation progressive, inéluctable. Sur la droite, tel l'affluent d'un fleuve, la route venant de Monachil rejoint le Grand Axe. Le long de la route, on peut s'arrêter se désaltérer dans uns de bars ouverts. Côté végétation, on trouve des exemplaires d'Abies pinsapo dans la sierra Nevada et surtout dans les proches forêts de la Grazalema, une petite région voisine de Cadix, connue pour sa généreuse pluviométrie qui lui attribue des records nationaux. Après une croissance lente, ils peuvent atteindre 30 mètres. Leurs branches sont serrées, les aiguilles rigides et plates, le feuillage gris-bleu et le sommet légèrement aplati. Ailleurs, ils poussent en Suède ou en Norvège.

Un grand virage à droite, au lieu-dit El Dornajo, annonce un changement de décor. Altitude : 1 600 m. A gauche, la route dite des "Sabinas" s'envole vers le sommet, magnifique et solitaire. A droite, direction la station de ski de Prado Llano. Loin devant, le Pico Veleta détache son sommet en forme d'aileron de requin. Il veille comme une sentinelle sur les étendues pelées et mystérieuses de la sierra Nevada. La végétation se raréfie, le vent peut se lèver.

Veleta signifie "girouette" et le hasard n'y est pour rien puisque le vent tourne beaucoup et dans tous les sens. Au terme d'une interminable ligne droite, on aperçoit la station Mar y sol, un pur produit de la triste architecture des années 1960, où se disputèrent les championnats du monde de ski en 1996. En été, elle est lugubre et déserte. Restaurants et bars ont tiré le rideau. Quelques remontées mécaniques peuvent tourner à vide dans l'attente de promeneurs. Les hôtels portent des noms exotiques : Yéti, Kenya, Kilimandjaro... comme si la topologie locale ne permettait pas assez de rêver. Les seuls clients réguliers sont des cyclistes professionnels en phase de préparation, pensionnaires réguliers du Centro Alto Rendimiento (CAR), structure sportive d'accueil pour entraînement en altitude.

CAR-SierraNevada

(Centre De Alto Rendimiento - Centre d'entrainement en altitude - Sierra Nevada - Espagne - 2320m)

A 2 550 mètres, les rafales de vent peuvent atteindre les 140km/h. Le temps est capricieux, la météo peut changer en un quart d'heure et devenir infernale. Un dernier bistrot snack est peut être encore ouvert mais rien n'est moins sur. Il n'y a en effet que peu de touristes en plein été. Peut-être restent-t-ils encore quelques Allemands, des Belges ou des Anglais pour commander un hamburger aux oignons et une San Miguel bien fraîche. A quelques pas, de là se trouve un poste militaire des forces spéciales espagnoles aux volets fermés. Une barrière blanc et rouge bloque les véhicules motorisés. Seul les piétons, les cyclistes et quelques véhicules d’entretiens sont autorisés à continuer plus haut.

La route porte les balafres du gel et de l'hiver, un bitume criblé de trous comme après un bombardement, obligeant à slalomer entre les ornières et les nids de poule. La statue stylisée de la Vierge des neiges trône au-dessus du premier virage. On la trouve sur toutes les photos de vacances des touristes passés dans le coin. Sur la droite, on peut apercevoir un radiotélescope de 30 m. Plus de 200 chercheurs viennent chaque année étudier le système solaire, la poussière interstellaire, les gaz et la cosmologie. Le Pico Veleta se dépouille des derniers résidus végétaux, il devient minéral, brûlé, pelé, solitaire dans sa solitude. On monte par gros lacets, la route ondule comme un énorme boa paresseux, le vent vous freine telle une main invisible. A gauche, l'ancien observatoire délabré et perché sur un piton rocheux, rappelle les maisons hantées des landes écossaises nappées de brume.

A partir de 3000 m, le route qui subit le gel les 3/4 de l'année devient compliquée pour les vélos de route (impraticable sur le dernier kilomètre). On avance désormais sur de la pierraille, le long d'une roche découpée, tranchante, de l'ardoise érodée par le vent, la pluie et le froid. La route devient piste puis un tas de cailloux à quelques hectomètres du sommet. Le Pico Veleta durcit sa pente avec l'altitude. Près de 10 % sur la fin. La piste meurt au pied d'un roc escarpé qu'il faut escalader à pied. La borne officielle qui indique le sommet, posée par l'Institut géographique et cadastral se relie à pieds. Une petite plaque en métal, fixée dans la pierre, met en garde : "La destruction de cette borne est punie par la loi."  La vue depuis ce toit de l'Europe s'étend sur un univers aride, une solitude désolée sculptée par les rafales, un immense cratère lunaire. Au loin vers le sud, des plages blanches miroitent contre la Méditerranée argentée. Une fine bande noire, de l'épaisseur d'un cil, suit l'horizon : ce sont les côtes du Maroc.

(Sources: Guillaume Prébois - lemonde.fr - Août 2013 / Olivier Rochat - http://bikeforafrica.ch)

Pour visualiser des photos du site, vous pouvez consulter ce site : http://passes-montagnes.fr/htlm1/nevada.html

Article mis en ligne en octobre 2019

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Mes sorties cyclistes au féminin
  • Je suis née en 1974. J'ai toujours aimé le cyclisme et je le pratique le plus souvent en solitaire depuis mon adolescence. Ce blog me permet de partager mes expériences cyclistes et touristiques en dehors de tout objectif de compétition.
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